Quoi ? Comment ? Pourquoi ? Regards croisés par un médecin fédéral et une psychomotricienne sur les bienfaits des pratiques handivalides.
Qu’entendons-nous par une pratique handivalide ?
Elle consiste à pratiquer des activités sportives ou culturelles en associant personnes valides et personnes en situation de handicap. Le terme handicap est utilisé ici au sens large, à destination d’une personne présentant une réduction de ses capacités physiques, sensorielles ou mentales diminuant ses possibilités d’effectuer ces activités telles qu’elles se pratiquent habituellement.
Prenons l’exemple du basket-ball qui se pratique en courant. Une personne en fauteuil roulant ne peut donc pas participer à cette forme classique, d’où l’idée d’un basket pour les personnes en situation de handicap, qui consiste à pratiquer le basket en fauteuil avec un public mixte.
Pourquoi une pratique mixte handivalide ?
Une des choses apprises au contact des personnes en situation de handicap est que leur souhait est de redevenir une personne sans handicap. Même si le développement du handisport a été pour beaucoup un moyen de refaire du sport et de s’épanouir personnellement, cette pratique enferme les personnes dans une catégorie toujours à part. La pratique handivalide permet alors cette immersion sociale facilitant d’autant leur intégration au sein de la société.
La réflexion de départ était de briser cette frontière entre deux profils de pratiquants. Un autre sujet de réflexion est aussi de dire que chaque personne valide est l’handicapée de quelqu’un. En reprenant l’exemple du basket, la personne en fauteuil est la personne non-valide. Mais cette situation s’inverse en basket fauteuil quand cette personne devient le joueur valide puisque la personne sans handicap manie beaucoup moins bien le fauteuil. L’idée maîtresse de la pratique handivalide est de permettre de pratiquer des activités dans lesquelles handicapés et valides sont à armes égales et dans lesquelles leurs différences sont gommées.
Les différents types de pratiques :
- Pratique de compensation : c’est le cas d’une personne ne pouvant exécuter seule une activité qui sera compensée par une personne valide. Le meilleur exemple est celui de la joëlette. Ce matériel permet à des personnes ne pouvant se déplacer seules dans un environnement non adapté de le faire avec l’aide d’une personne valide.
- Pratique partagée : l’exemple le plus connu est le tandem avec des non-voyants. Le valide compense la vue déficiente du malvoyant par une pratique à deux du vélo.
- Pratique mixte : elle consiste à effectuer une activité où les deux profils sont à armes égales. C’est la pratique idéale.
Cela peut-être bien entendu des pratiques innovantes qui n’existent pas en tant que sports classiques olympiques ou paralympiques.
Le foot en marchant en est un exemple concret. Il permet à des personnes avec une difficulté de santé de pouvoir pratiquer un sport collectif dès lors qu’elles sont capables de marcher. Cette pratique handivalide s’inscrit parfaitement dans le projet de développement de la fédération. Sa volonté est d’ouvrir ce type de pratiques, non uniquement aux non-valides tels qu’ils sont définis habituellement, mais à toutes les personnes qui possèdent des fragilités de santé, qu’elles soient congénitales, acquises, traumatiques ou post maladie. Ces pratiques s’inscrivent bien évidemment dans le projet sport santé de la fédération.
Comme le précise Manon Fernandez, psychomotricienne, chez de nombreuses personnes en situation de handicap, qu’il soit inné ou acquis, il ressort une difficulté à se socialiser […] Il est connu que le sport est un moyen de rencontrer d’autres personnes, différentes les unes des autres, mais rassemblées dans un même intérêt, autour d’une même passion.
Un autre intérêt de cette pratique est d’annihiler les conséquences des incapacités et du handicap pour que valide et handicapé puissent pratiquer ensemble sans que ce dernier se sente amoindri. Cette façon d’adapter l’activité aux capacités des participants et non l’inverse, permet à la personne en situation de handicap d’oublier ses incapacités et de se sentir à nouveau valide. La pratique de sport avec des pairs non porteurs de handicaps permet également une revalorisation de la personne et, ainsi, une augmentation de la confiance en soi. Plus la personne a confiance en elle, plus elle va oser s’ouvrir aux autres, ces derniers allant à leur tour la valoriser. C’est un cercle bienveillant qui se met en place précise Manon Fernandez.
Pour les personnes valides, cette pratique mixte est l’occasion de découvrir de nouvelles activités qui, à l’usage, se révèlent souvent plus adaptées pour eux-mêmes. Un autre intérêt est que ces pratiques sont effectuées dans le but de préserver l’intégrité physique et mentale des pratiquants afin d’éviter toute blessure ou maladie. Pour le valide, c’est aussi l’occasion de découvrir le milieu du handicap et de s’ouvrir à la différence. Apprendre à connaître le milieu du handicap, côtoyer des personnes porteuses de divers handicaps physiques ou mentaux, permettrait également de lutter contre la discrimination et le jugement. Pour que le partage entre personnes porteuses et non porteuses de handicaps puisse se faire dans les meilleures conditions possibles, il est nécessaire de s’assurer de la capacité de chacun à se respecter. L’esprit d’équipe et l’envie de partager des moments ensemble sont nécessaires. Enfin, une ouverture d’esprit est également indispensable.
Cette pratique handivalide est donc souvent une expérience très enrichissante pour tous les pratiquants et participe grandement à leur épanouissement personnel et social.
Bertrand Rousseau en collaboration avec Manon Fernandez