Mêlant techniques gymniques, d’arts martiaux et d'entraînement militaire, le parkour a le vent en poupe auprès des jeunes. Portrait d’une discipline qui a fait de la liberté son premier code.
Comment structurer le développement d’une pratique qui repose sur le principe de liberté ? C’est le paradoxe auquel cette discipline urbaine, aussi appelée art du déplacement, en plein essor et popularisée par le cinéma et les réseaux sociaux, est confrontée.
Le parkour (PK) est né au début des années 90 en banlieue parisienne, de la volonté de jeunes de se servir de leur environnement pour réaliser toutes sortes d’acrobaties : sauts, franchissements d’obstacles, figures, etc. Sa naissance est le fruit de diverses influences. Académiques tout d’abord, par les travaux de l’officier de marine Georges Hébert qui défendait une vision naturelle du sport : une activité reposant sur l’idée de lutte contre un élément défini. Une influence culturelle, ensuite, avec la sortie du film Yamakasi qui l’a popularisé, allant même jusqu’à lui donner son nom auprès du grand public.
À mesure que la discipline s’est développée dans les années 2000, grâce à internet et une exposition médiatique accrue, différents courants ont émergé. La liberté qui lui est propre a généré des débats de fond sur la technique et sa finalité. Victime de son succès, le parkour est toujours en proie à des dissensions contribuant à morceler et multiplier les acteurs, notamment issus des divisions des membres fondateurs de la discipline.
La fédération de Parkour a été créée en 2011 ; elle regroupait en 2019 31 clubs dans toute la France et 1 350 licenciés. Elle s’est récemment associée à la fédération des ASPTT pour l’aider à se développer, notamment s’agissant de la formation de ses encadrants. C’est toutefois la fédération française de Gymnastique qui a obtenu en 2020 la délégation du ministère des Sports pour la discipline. D’autres associations développent leur propre philosophie, comme Parkour Old School de Dominique Lexilus, lui-même formé par David Belle (l’un des principaux fondateurs de la discipline).
Au sein de la fédération, des associations proposent également l’activité, conscientes de ce que les codes du parkour peuvent apporter aux pratiquants. Ils reposent sur l’estime, l’acceptation et la confiance en soi à travers une activité spectaculaire, ludique et non compétitive.
Pour Alain Landais, président de l’association La Vigilante (Deuil-La-Barre), l’aspect spectaculaire de la discipline est déterminant dans l’attractivité auprès des jeunes qui cherchent à se surpasser. La dimension ludique du parkour offre elle une variété et liberté de mouvement qui plaît également à des pratiquants parfois issus d’autres activités plus codifiées. Antoine Deltour, président de l’association L’Amandinoise (Saint-Amand-Les-Eaux) va plus loin en précisant qu’elle est une forme de défouloir, le tout dans un cadre convivial puisque nombreux sont ceux qui viennent découvrir l’art du déplacement en groupes d’amis. Enfin, la logique de loisir a permis d’attirer un public d’anciens sportifs, comme des gymnastes qui voulaient découvrir une autre activité tout en prenant du recul par rapport aux compétitions. Si elle est contraire à la philosophie du parkour, cela n’empêche pas de pouvoir organiser des rencontres loisirs afin de permettre aux pratiquants de se jauger et d’apprendre des autres, tout en faisant la promotion de la discipline.
Le PK a rapidement trouvé son public : pour l’association des Coqs Rouges (Bordeaux), le nombre d’adhérents pour l’activité est passé de 10 la première année à 100 aujourd’hui, montrant toute la potentialité de la discipline. La répartition est largement en faveur des pratiquants masculins, bien que l’activité soit mixte. Mathieu Le Gall, entraîneur de la section Parkour aux Coqs Rouges, l’explique par le manque de modèles féminins auxquels s’identifier sur les réseaux sociaux.
L’activité est ainsi un levier de développement pour l’association afin d’attirer de nouveaux adhérents, et ce d’autant plus qu’elle ne nécessite pas d’importants investissements de matériel. Les Coqs Rouges ont même construit leurs propres modules à partir de meubles, en plus du matériel gymnique dont l’association dispose. Antoine Deltour confirme que l’existence d’une section gymnique simplifie la logistique de mise en place, en permettant de partager un même espace avec les gymnastes. Le constat est le même pour l’encadrement, comme Alain Landais le souligne, en faisant appel à des cadres spécialisés en gymnastique.
Afin d’accompagner le développement de l’activité et répondre à une forte demande, la mise en place d’une formation d’encadrants spécialisés sera une étape importante. Tout d’abord afin d’améliorer leurs compétences techniques, de garantir la sécurité des pratiquants, mais aussi de les sensibiliser à la philosophie propre au parkour et ainsi continuer de faire vivre cette activité si particulière.
Article issu de la revue fédérale Les Jeunes N°2573, vous pouvez consulter ce numéro en intégralité ici !